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Villate : militaire, professeur, résistant.

 

 

 

Au début de la Seconde Guerre mondiale, Robert Villate est chef d'état-major de la deuxième Division d’Infanterie. Rapidement après l’armistice du 22 juin 1940, le lieutenant-colonel est affecté à l'état-major du commandement de la Creuse, le 1er juillet 1940, en zone libre. Mais il n’accepte pas l’abdication du mois de juin et quitte l’armée. Il est alors successivement placé en congé d’armistice puis admis à faire valoir ses droits à la retraite le 9 décembre 1940 et le 1er juin 1941. Peu après l’armistice, Villate envoie une lettre datée du 30 juillet 1940 à Monsieur Valette, directeur de l’École Alsacienne, pour lui proposer ses services en tant que professeur d'histoire et géographie. Mais sa demande n’aboutit vraisemblablement pas, en effet, l’École Alsacienne dispose dans ses archives d’une seconde lettre envoyée par le militaire pour renouveler sa candidature où il précise que l’école n’avait pu « donner une suite favorable » à sa candidature. Mais Villate obtient finalement après l’envoi de cette seconde lettre le poste auquel il aspire. Nous avons en effet retrouvé la « notice individuelle » du désormais professeur du secondaire. Nous pouvons y découvrir que le jeune retraité militaire obtient cinq classes à la rentrée du 1er octobre 1941 : la 1ère D, la 2nde D, la 3ème A, et deux classes de 4ème (A et AD). En se retournant vers sa passion de l’histoire et géographie et en quittant l’armée, Robert Villate fait ainsi preuve d’une certaine résistance face aux allemands et à Pétain. Le Maréchal Pétain décide d’entreprendre une politique de collaboration avec les allemands. Lorsque Villate quitte l’armée, il marque la volonté de s’affranchir de cette décision. Il ne veut pas participer à l’accomplissement du troisième Reich.

 

Lors de l’année scolaire 1942-1943, nous n’avons pas été dans la mesure de retrouver des documents attestant d’une quelconque activité de résistance de Robert Villate. Nous avons malgré tout découvert (dans les archives de l’École Alsacienne) une photo de classe sur laquelle Robert Villate prend la pose avec une classe de 4ème. Cet indice nous porte à croire qu’il a continué de donner cours tout au long de cette année.

 

 

 

 

 

 

Ci-contre, une photo de classe prise devant le monument

aux mort de l'Ecole alsacienne en 1942-1943. Robert 

Villate est au premier rang (4ème en partant de la gauche)

avec sa classe de 4ème A2B.

 

 

 

 

 

 

D’après une lettre du Général Malleret-Joinville, membre du parti communiste, résistant et un des quatre généraux de brigade FFI durant la libération, le colonel Villate a commencé à servir la résistance au milieu de l’année 1943. Nous pouvons recouper cette affirmation avec une déclaration faite par Villate dans une courte autobiographie qu’il rédige pour le N°2 de Calamus, journal de l’École Alsacienne, il annonce alors qu’il a été après sa retraite militaire «attiré par la résistance». D’après le Général Malleret-Joinville, Villate -fort de son expérience de militaire- aurait été instructeur et aurait ainsi enseigné à de nombreux groupes d’étudiants et jeunes officiers d’active les «tactiques de la guérilla» et de «combats de rues».

D’après les archives de l’armée française, Villate «sert dans les Forces françaises de l’intérieur du 1er juin 1944 au 25 août 1944».

 

Villate se porte en effet volontaire pour grossir les rangs du FN, le Front national. Celui-ci est à différencier de l’organisation de coordination des partis nationalistes français de droite qui a été active entre 1934 et 1940 ainsi que du parti politique d’extrême droite actuel créé dans les années 1970.

Il s’agit ici du Front national de lutte pour la libération et l'indépendance de la France, une organisation politique de la Résistance intérieure française créée par le Parti communiste français vers le mois de mai 1941.

 

Les Francs-tireurs et partisans français (FTPF) en est la branche armée. Majoritairement composé de communistes, le mouvement fait néanmoins appel aux individus de tous bords politiques pour s’insurger face à l’ennemi. Le colonel Villate fait précisément partie de ces individus n’étant pas membre du Parti communiste français (PCF) mais ayant pris les armes avec eux lors de l’insurrection d’août 1944.

 

Le Colonel Rol Tanguy, chef des FFI d’île de France et compagnon de la libération avait une affection et un respect particuliers pour Robert Villate. Il rencontre ce dernier peu avant le 19 août 1944 Place de Rennes (aujourd’hui nommé Place du 18 juin). Rol Tanguy rapporte dans un album datant de 1995 (Protestantisme, édition Graphein) que Rethal (pseudonyme de R.Villate) a perdu contact avec son équipe en 1944 (au sujet de laquelle nous n’avons pas trouvé d’autres informations que cette évocation) ; Le colonel Rol Tanguy lui propose alors un poste au sein de son Etat-major. Il devient alors officier de l’Etat-major du Colonel Rol Tanguy. Les deux hommes et leur équipe s’installent rue Schneider (14ème arrondissement de Paris) puis dans les sous-sols de Denfert-Rochereau, sous le lion. Robert Villate continue néanmoins de donner ses cours et une fois sa matinée de travail terminée -il s’était arrangé avec l’administration de l’école pour n’avoir cours que le matin- il rejoignait la place Denfert-Rochereau pour organiser la libération de Paris imminente.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ci-contre, on peut voir Robert Villate (à gauche) dans les

sous-sols du PC de Denfert Rochereau. Adjoint du colonel

Rol Tanguy, prend part à la préparation et à la conduite de

l'insurrection.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le personnage articule ainsi sa vie de 1939 à 1945 entre la guerre contre l’Axe, l’enseignement de l’Histoire et Géographie à l’École Alsacienne et la résistance (notamment au près de l’Etat-Major de Rol Tanguy). Nous notons que ces différentes activités n’étaient pas sans influence entre elles. De sorte que nous pouvons remarquer que le côté pédagogue empiète sur le côté militaire de R.Villate puisque l’une de ses missions pour la préparation de la libération est d’enseigner aux plus jeunes la manière de se battre dans une guérilla. D’autre part, d’après le témoignage de Claude Bitran -née en 1931 et élève à l’école de 1935 à 1942- le Colonel est perçu par ses élèves comme un être froid, rachitique et peu jovial. Dans les couloirs, les élèves de l’école l’appelle entre crainte et respect “Monsieur”. Il représente dans l’imaginaire collectif la figure de l’autorité à l’école. Les jeunes étudiants ne s’imaginent d’ailleurs absolument pas qu’il ait pu avoir un tel rôle dans la résistance.

Robert Villate, homme de conviction et possédant un important sens du devoir, poursuit son enseignement de l’Histoire et de la Géographie à l’École alsacienne et participe en parallèle à l’organisation de la libération de Paris.

 

Après la guerre, de 1945 jusqu’en 1958, Robert Villate continue d’exercer son métier de professeur d’Histoire et de Géographique et monte les échelons au sein de l’administration de l’École alsacienne. Il devient sous directeur dés 1945. Sept ans plus tard, en 1952 il partage la direction avec Georges Hacquard et devient directeur des pouvoirs. Il gère ainsi les questions dites d’ordre “administratif”. Il dirige ensuite l’école seul jusqu’en 1958 et meurt quelques jours après avoir quitté “son école”.

 

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